lundi 2 juillet 2007

Que décider (faire) quand tout change ?

Finalement, pour commencer, je me suis posé la question de savoir pourquoi plus ça change et plus, c'est la même chose depuis ces dernières décennies.


En cherchant bien, j'ai trouvé une explication scientifique, le biais psychologique.

Prenons un exemple. Attraper une feuille de papier et un crayon. Tracer les deux signes suivants dans cet ordre : IX. L'exercice consiste à ajouter un seul trait, appliqué en une seule fois et sans que le crayon quitte le papier, pour que cela fasse 6.
- ...?
- Cherchez un peu encore..
- ... ?
- Pas facile, hein ?
-... ? ... ? ... ? :o(
- Bon, en fait, la solution consiste à tracer un S devant l'IX. Cela donne bien 6, mais écrit en lettres (SIX) et non en chiffres (VI ou 6). Evident, non ?

En l'occurrence le biais psychologique a consisté à voir dans la figure "IX", 9 en chiffres romains (ce que l'énoncé induit parce qu'il parle d'obtenir un nombre). A partir de là, tout effort devient inutile. En entrant dans la logique des chiffres et non de leur représentation ce qui inclut les lettres, votre perception des choses vous privait de la solution

Mais ce n'est pas là le seul biais auquel nous ayons à devoir faire face.

Il en existe un autre tout aussi redoutable et insidieux. Celui qui fait que, parfois, plus ça change et plus c'est la même chose. Ce qui correspond bien aux bilans politiques de ces dernières décennies qui fait que globalement, on ne vit pas mieux. Au point, que pour la première fois dans l'histoire du monde moderne, une génération - la notre - en vient à penser que ses enfants vivront moins bien qu'elle !

La cause, cette fois, en est le changement. Ou plutôt, un certain type de changement. Les chercheurs de l'Ecole de Palo Alto vous diront qu'il existe, en fait, deux type de changement. Le premier n'implique pas de changer de logique pour y faire face. Il fait plus froid, par exemple, il suffit donc de mettre un pull en plus. Ce type de changement n'implique pas que nous remettions en question nos habitudes et nos façons de penser.

Il y a donc un autre type de changement qui, lui, implique de changer de niveau de logique pour, justement, "en sortir". Ce qui signifie changer de changer nos modes de pensée. C'est, dans l'exemple du IX, ce qui devrait permettre de sortir de la logique du calcul et donc de la résolution du problème posé pour adopter celle de la représentation des nombres, de l'écriture et pour finir, celle des lettres.

Le pire dans ce genre de situation, c'est que l'on se trouve alors confronter à deux types de problème. Si le premier vous amène à chercher des solutions là où il ne peut pas y en avoir ; le second, vous amène à vouloir traiter des problèmes que l'urgence crée au point d'oublier où vous aller.

Conséquence immédiate, ce n'est plus vous qui piloter les choses. Ce sont les choses qui poursuivent leur voie sur laquelle certaines de vos décisions antérieures les ont poussées initialement. On ne sait plus où on va. Et ce n'est pas anodin.

On retrouve là la situation à l'origine de la plupart des catastrophes aériennes où l'avion s'écrase tout en étant en parfait état de marche... Traiter des problèmes provoqués par un changement de décision de dernière minute amène à laisser l'avion à aller là où le pilote automatique l'entraîne. Ce n'est plus l'équipage qui le pilote. Il est dépassé. Et, à plus de 900 km/heure, il ne peut plus rien maîtriser.

Si une mauvaise valeur a été entrée dans l'ordinateur de bord, ce que favorise souvent une décision de dernière minute, alors il suffit d'un rien pour que la catastrophe devienne quasiment inéluctable.

Dans tous les cas, s'il y a bien un pilote dans l'avion, dans ce genre de situation, malgré la compétence souvent très grande de l'équipage, l'avion n'est plus piloté.

De toute évidence, cela ressemble fort à ce que nous vivons en politique depuis quelques années déjà. Ce ne sont pas tant les réformes qui sont urgentes que de se souvenir où l'on va - tenter de vivre mieux - et de s'en donner alors les moyens. Une réforme, un renouveau ne sont jamais des fins en soi.

De toute évidence, si on veut sortir de la situation dans laquelle on est, il va falloir s'attacher à reprendre la direction des choses et cesser immédiatement de s'occuper d'urgences qui masquent justement ce qu'il faudrait voir et faire.

Comment ? C'est ce que nous allons voir dans notre prochaine causerie...

3 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est pas : "développement durable" la solution ?

J'ai l'impression d'avoir moi-même ce genre de réflexion depuis quelques mois, sur un constat que depuis qu'on se bat contre le chômage, il n'a pas vraiment reculé. Et que donc la vérité est ailleurs.

Dans l'attente de lire la suite de vos aventures.

Anonyme a dit…

Le principe capitaliste me semble également être un bon exemple de la difficulté à sortir d'un schéma de pensée profondément ancré. Tous les spécialistes savent que la croissance a ses limites, mais la plupart des politiques s'inscrivent dans des schémas de croissance censés financer le fonctionnement de la société. La nécessité de sortir de cette approche est réelle, mais nos modes de pensée sont tellement sclérosés qu'il nous faudra probablement attendre une nécessité urgente de changement pour que soient envisagées d'autres solutions (dont la décroissance). Même constat sur la gestion énergétique et l'écologie...

Snoopy a dit…

@JR. Ça devrait effectivement ressembler au "développement durable" sauf que le concept est bien trop vague et qu'il englobe beaucoup trop d'acceptions pour qu'il puisse déboucher sur des solutions pratiques.

Pour le reste, Cela ne concerne pas seulement le chômage mais pratiquement tous les problèmes de société auxquels nous sommes confrontés actuellement. Et ce,de l'école à la santé par exemple. Je vais donc être amené y venir dans les prochains billets.

#Alain. Bonne approche effectivement. On ne cesse de parler d'innovation sans jamais avoir lu, de toute évidence le bouquin de Schumpeter qui en décrit les mécanismes. Le titre de ce livre ? "Capitalisme, socialism et démocratie" (traduit pour une fois de façon littérale. Intéressant que la théorie de l'innovation ait été établie dans un bouquin dont l'objet est de démontrer que si le socialisme devrait l'emporter sur le capitalisme, moins par ses qualités que par le dynamisme même du capitalisme qui devrait, par l'intermédiaire de l'innovation, s'auto-détruire ! La nécessité urgente dont vous parlez est en train d'être créer par l'innovation... Tant vantée par ailleurs.