jeudi 19 juillet 2007

Penser l'avenir

Je reprends, ici, mes échanges avec JR parce qu'ils touchent à l'essentiel pour comprendre ce qui se trame avec notre entrée dans le XXIème siècle. (A la re-lecture, je ne pensais pas que vouloir démontrer la nécessité de penser solution déboucherait à traiter de la question européenne ! Comme quoi, il y a là le bout de la pelote de ficelle sur lequel il faut tirer !).

J'encourage donc le lecteur intéressé, à revenir au billet précédent et aux premiers échanges avec JR au niveau des commentaires.

Je reproduis ma dernière réponse que je complète (texte en bleu) à la lumière de mes échanges avec JR :

"La voie consiste à arrêter de penser en termes de problèmes. La lutte contre la pauvreté est un non sens parce que la pauvreté est un état, un statut. La seule chose à faire, c'est de lutter contre les conditions qui créer la pauvreté. En l'occurrence contre la misère parce que la misère correspond, elle, aux divers sentiments ressentis face à la pauvreté (il n'y a pas une misère, mais des misères). Et les sentiments, eux , changent et on peut faire en sorte qu'ils changent. Et souvent, il suffit de peu de chose, d'un peu de considération.

"Lutter contre le chômage est un non sens parce que le chômage est une conséquence, pas une cause. Etc, etc, etc... C'est la raison pour laquelle les mesures qu'on nous présente ne marchent pas. Le "bouclier fiscal" en est un autre exemple.

"L'humanitaire en est un autre exemple. Soit il relève de la charité et à part soigner la mauvaise conscience des "riches", elle ne règle rien sur le terrain. Soit, elle vise à donner les moyens d'espérer et de prendre en main leur destin à ceux qui sont dans la peine et là alors, elle lutte contre la misère de façon durable. Et l'expérience le prouve, c'est effectivement la voie dans laquelle il faut croire et s'engager.

"L'évocation pays "riches" pays "pauvres" était allusion aux discours bien pensant de la "communauté internationale". Elle fixe ainsi des frontières qui, dès lors, seront quasiment impossibles à faire sauter. Sauf à ce que ce soient les intéressés eux-mêmes qui, déjouant la bonne pensée occidentale, accèdent à la scène internationale. Hier, c'était le Japon de l'après-guerre, jugé moribond et tout juste capable de "copier" alors qu'il apprenait. C'est aujourd'hui l'Inde et la Chine qui font peur parce que l'on n'est toujours pas capable, à force d'ânonner nos clichés, de comprendre les situations et donc d'en prendre la mesure.

"La recherche d'un monde meilleur passe effectivement par l'imaginaire. Et contrairement aux apparences, il s'agit moins d'innover que d'être capable de se remettre en question afin de percevoir, enfin, en quels termes il convient de poser les problèmes pour trouver des solutions, plutôt que de fuir le réel en prenant nos désirs pour la réalité !

"Le monde idéal d'aujourd'hui est un monde où les échanges entre personnes, entre peuples, entre cultures, ne s'effectuent plus dans une logique de jeu à somme nulle où il y a forcément un gagnant et forcément un perdant ! Imaginer un cerveau où chaque neurone n'aurait qu'une seule "idée", "avoir l'autre" ? Et chaque synapse, retenir l'information pour mieux la vendre ! Voilà où nous en sommes. Le monde et les hommes en réseau d'aujourd'hui relèvent plus du cerveau que d'un ensemble disparate d'intérêts particuliers. Voilà en quoi le monde d'aujourd'hui a changé. Voilà ce qu'il devient urgent de prendre conscience.

"Vivre un tel monde n'est donc pas compliqué. Cela consiste à s'assurer, qu'à chaque étape de chaque projet, que ceux qui participent, directement et indirectement à son développement y trouvent, à titre personnel et collectif, des raisons de vivre leur vie. Pour ça, il faut cesser de considérer uniquement les gens comme des con...tributeurs ou des contribuables.

"La solution à la recherche d'un monde meilleur passe par la remise en cause de nos façons de pensée qui, systématiquement, nous amène prendre les problèmes pour des solutions.

"C'est le message de fonds qu'il faut décliner sans cesse tant le pli est pris de nous faire prendre des vessies pour des lanternes !

"Je sais. Ce n'est pas évident !"

JR ajoute alors (extrait de sa réponse)

"Vous connaissez Tryo ?

Dans une chanson intitulé "J'ai rien prévu pour demain" ils chantent :

"[Un monde]
où tout le monde à compris,
que donner à quelqu'un,
c'est ce faire un ami."

C'est un peu ça, une relation win/win, 1+1 = 3, mais où la création de richesse profite à tous..."

Cher JR, ça va encore nettement plus loin que ça. Pour faire simple, dès lors que le monde est majoritairement connecté, la création de richesse des uns est création de la richesse de chacun et de tous ! A contrario, les dysfonctionnements des uns deviennent les dysfonctionnements de tous. Quel est le degré de granularité du phénomène (A partir de quand le dysfonctionnement de certains, affecte-t-il chacun ?) ? Je ne le sais pas. Ce qui paraît certain, c'est qu'à plus d'un milliard d'internautes, le phénomène devient patent.

Ça paraît fou ! Et pourtant, c'est bien sur ce phénomène que repose, entre autres, le marketing viral et donc le succès économique d'un Google, d'un You Tube ou d'un MySpace.

Donc pour revenir aux paroles de la chanson, donner à quelqu'un reviendrait tout autant à se faire un ami qu'à se faire du bien à soi. Bon, ça manque de poésie, mais ça permet aussi de remettre les pendules à l'heure.

Contrairement à ce que disent MM Hulot, Arthus-Bertrand et les mal-pensants, c'est moins la planète qu'il faut sauver que l'homme, la femme, les enfants et les personnes âgées en permettant à chacun d'eux de s'inventer un avenir qui, cette fois, résonnera avec celui des autres et avec le reste, connu ou méconnu encore, de l'univers. C'est en tout cas ce que nous laisse entendre la science aujourd'hui.

Et donc, notre survie ne passe pas par des petits gestes et des petites pensées dont le moteur essentiel est la culpabilité. Cela passe par la capacité de s'inventer un futur ce que ne proposent pas ces gens-là et tous les mal-pensants. A la stratégie de la peur, il commence à devenir urgent de s'engager dans une stratégie de l'espoir. Et donc, pour commencer, d'accepter de remettre en cause nos façons, de toute évidence, dépassées, de penser le monde.

Difficile ? Certes.

Impossible ? Non. Comme l'a été la construction de la paix en Europe au détour de Seconde Guerre mondiale.

Parce que la véritable finalité de la construction européenne, c'est la paix. Le reste relève des moyens et si aujourd'hui, la construction européenne bloque, c'est qu'elle ne parvient plus à avoir, ici aussi, les ambitions de ses moyens. Parce que cela ne peut plus être, si jamais cela l'a été un jour, une affaire de bureaucratie, de fonctionnaires et encore moins de technocrates. Ce ne peut être qu'une affaire de visionnaire.

Que devrait donc être pour les 30 à 50 ans qui viennent, après l'instauration de la paix en Europe, son ambition politique - et non économique au sens étroit et quelque peu borné du terme ? Telle est la question à laquelle il faut trouver, très vite, une réponse.

Le traité proposé n'est qu'un emplâtre sur une jambe de bois, qui, pour l'instant, sauve essentiellement la tête de gens dont les faits montrent que leur façon de penser les réalités de l'Europe ne correspond pas aux réalités du monde d'aujourd'hui. Ce qui est en passe de devenir, comme pour les rapports à la nature, insupportable tant le niveau de destruction atteint remet en cause l'avenir de tous.

Alors, après l'instauration de la paix, à quelle miracle pensez-vous que nous devrions rêver aujourd'hui au niveau européen ? D'ailleurs, l'Europe est-elle encore pertinente en termes de couverture géographique ? Le fait que la Turquie frappe à la porte de la communauté européenne montre bien que la portée de cette communauté-là va bien au-delà de ces frontières. Reste alors à se poser la question de savoir quel est le rôle de l'économique et celui des règles - en tant que moyens et non en tant que finalités - dans l'instauration, le maintien et le développement de cette communauté.

C'est dans ce domaine, qu'il faut sans doute penser d'abord. L'avenir de chacun ne peut plus se penser en dehors de cette dimension-là aussi. Pour les autres, mais aussi et surtout pour soi aussi. Avenir bien ordonné, commence par soi-même. C'est dire qu'il va falloir revoir, de fond en comble, les raisons qui nous ont permis d'en arriver là.

La question des grandes guerres européennes étant réglé, il importe maintenant de s'attaquer à la suite, pour régler cette fois, le sort des conflits régionaux potentiels dont l'ex-Yougoslavie nous a montré la réalité. Parvenu à ce point, j'en viens à penser que l'objet même de la construction européenne est toujours le même : l'instauration de la paix. Que ce qui change, par contre, c'est la façon de penser et de mettre en œuvre les moyens d'y parvenir.

L'Europe d'aujourd'hui, à force de se prendre au sérieux sous l'impulsion de fonctionnaires sans réelle dimension politique possible est en train de détruire l'idée même de l'homme européen c'est-à-dire, de l'homme vivant en paix et de la paix. La paix ne se construit pas, ne s'instaure pas, n'existera pas durablement sans les hommes, les femmes, les enfants, les personnes âgées, ceux et celles qui vivent là mais aussi ailleurs. Le monde d'aujourd'hui est fait de gens différents qui en font sa richesse. Il sera de moins en moins un monde fait d'étrangers tant le concept même est devenu mortifère et anachronique.


2 commentaires:

Anonyme a dit…

J'aime beaucoup l'idée que l'Europe puisse servir de base à l'invention d'un monde meilleur.

Snoopy a dit…

Moi aussi. Et pour cause. Je crois que penser que l'Europe puisse servir à autre chose qu'à inventer un monde meilleur serait une très grave erreur. Ce serait le fruit d'un rêve totalement masochiste. Au moins pour les citoyens européens. Comme ce n'est pas là la qualité principale de ceux qui président aux destinées de la machine européenne, il y a intérêt à demeuré très attentif en permanence !